Reporter des champs

Publié le par Charlotte

Ah, l'aménagement du territoire à la campagne ! c'est quand même sympa ! Chose vue lors de mon premier reportage pour le journal local (ou plutôt l'hebdo, oui c'est vraiment mon truc, l'hebdo) : des chevaux de trait utilisés pour le débardage des arbres coupés. Cela se passait jeudi 25 septembre à Bretenoux, sur l'île de la Bourgnatelle en cours de réaménagement. Dix ans qu'ils en parlaient, et ils commencent les travaux juste quand j'arrive ! Pareil pour mon deuxième reportage pour le même hebdo, le lendemain, cette fois à Puybrun à quelques kilomètres de Bretenoux par la départementale. Alors là, j'ai cru faire une balade intéressante en enfourchant mon vélo, mais bonjour les camions. Et je me suis trouvée bien maligne en arrivant sur le lieu du reportage, pour une visite du chantier de la déviation de Puybrun (là encore, dix ans qu'ils parlent d'une route plus rapide pour rejoindre l'autoroute, et c'est juste l'année où je débarque que la première étape commence... et juste le mois où je débarque qu'ils organisent la visite ! ) Ah vraiment c'était le baptême du feu cette première semaine pour l'hebdo quercynois. Je crois que j'ai couvert les deux événements nord- lotois du siècle ! Après, il ne me restera plus que la soirée Aligot du club de pétanque à Saint-Michel-Loubéjou et le portrait de Dédé, éleveur de tourterelles. Bref il y avait déjà des dizaines de voitures : la presse locale au complet, les maires des villages voisins, les présidents des conseils généraux du Lot et de la Corrèze (déclarations sarcastiques anti-sarkozistes au micro) lorsque j'arrivai sur mon petit vélo. Je me sentais à mi-style entre Cendrillon en citrouille et miss rebelle-rebelle façon écolo. Je vous passe les détails de la visite, la poussière, les ouvrages d'art, les élus très décontractés et fringants. J'en viens de suite au moment le plus chouette du reportage : la manif. Après la visite, réunion d'information publique au cinéma de Biars. La gendarmerie en travers de la route à grands coups de sifflets, un kilomètre de bagnoles garées le long de la route, et devant le cinéma, des centaines de salariés avec leurs pancartes et leurs militants CGT. Génial, que j'me dis, on se croirait à Vitry-sur-Seine ! Car s'il y a une chose que j'aimais bien à Vitry, vous connaissez le refrain, c'était... le militantisme. Eh bien croyez-le ou non, ici les salariés (de Andros en tête) clamaient : "Tous avec nos PDG" (sic) et le comble : "Laissez passer nos camions !"
Je résume car je sens que vous êtes perdus : le PDG de Andros vient de menacer de délocaliser car l'accès à l'autoroute est trop long et difficile. Alors ils venaient là dire aux élus : "Ce que vous voulez faire, faites-le ! Et vite !" (non mais). Je vais voir les salariés, je risque timidement un "C'est pas très écolo, votre slogan", mais évidemment il y a des priorités, ils avaient tous la trouille légitime de se retrouver au chômage. Quand on pense que la survie de tout un territoire passe par la pollution ! Finalement on n'est pas si loin de Vitry... Et je me prenais à rêver que tous ces salarié(e)s étaient brusquement pris du désir de créer leur boulot eux-mêmes. Je ne sais pas m
oi, cuire des crêpes et vendre leur confiture de figues, broder des tapis de souris, réparer des vélos dans leur garage... Réinventer la société de services, quoi ! Enfin si possible quelque chose qui ne nous ramène pas aux petits boulots de rue en Inde. La désindustrialisation, la peur de la mort en somme, risque d'exiger de nous une sacré dose de courage et de créativité.

Publié dans récits de campagne

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article